Aujourd’hui, il est légitime de s’interroger sur leur place dans l’économie de notre pays désormais mondialisé dans une Europe intégrée et en voie de réunification. Les principes qui guident notre réflexion pourraient s’appliquer aussi à la gouvernance d’entreprises privées dans certains secteurs stratégiques (par exemple l’eau, le médicament).
Principe n°1 :
C’est à la représentation nationale, après un large débat public, qu’il revient de définir les domaines dans lesquels l’Etat stratège doit intervenir pour réguler le marché. Ce principe précise que nous ne devons pas confondre :
– entreprises publiques,
– mission de services publics,
– statut des établissements.
A confondre les trois dimensions, on en perd le rôle de l’Etat, ou du moins, son rôle devient flou. On définit alors le champ des missions de service public.
On peut penser ainsi, outre les biens collectifs fondements d’une nation (éducation, justice, sécurité), que l’eau, les transports, les télécommunications (postales et numériques), la santé, la recherche, l’énergie font partie du champ de l’Etat stratège, garant de l’intérêt général. La dimension nationale doit prendre, pour la CFDT, toute son ampleur au sein de l’Europe.
Principe n°2 :
La matrice des biens ainsi définis peut alors être assumée, soit par l’Etat actionnaire (unique, majoritaire ou minoritaire), soit par des entreprises privées (nationales ou étrangères). Pour la CFDT, c’est alors le cahier des charges qui doit définir les règles nécessaires pour satisfaire les missions de service public.
S’il définit ces règles en alourdissant les coûts de production de ces biens, il doit en assumer le différentiel, lui-même ou en faisant participer les opérateurs concurrents comme c’est le cas aux Télécommunications. Ainsi, le débat sur la notion d’entreprise publique prend un tout autre sens que celui d’être pour ou contre les nationalisations.
Principe n°3 :
Lorsque la nation décide de conserver la maîtrise de la production de biens ou de tels services, elle doit veiller à faire jouer réellement son rôle aux divers conseils d’administration de ses diverses sociétés. Trop souvent, les technocraties internes aux entreprises publiques prennent le dessus des autres composantes du CA, notamment la composante salariale. On peut aussi penser que cela a été le cas pour certaines directions du ministère.
Principe N° 4 :
Le rôle des salariés membres de ces CA est indispensable mais doit être approfondi. Il faut qu’ils soient associés (après formation si nécessaire) aux divers comités qui préparent les CA (comité stratégique, d’audit, d’éthique on pense ici à la dimension développement durable).
Bien entendu, la contre-partie de la confiance, c’est une charte de déontologie au sein du CA. Les salariés s’engagent à respecter les confidentialités stratégiques qui permettent à une entreprise de vivre et de se développer.
On peut noter qu’à de très rares exceptions qui ne concernent pas notre organisation, les fuites dans la presse viennent parfois d’autres administrateurs. Ceci étant, nous pensons que le mode d’élection des salariés devrait être revu à la lumière des discussions engagées avec monsieur Fillon sur les règles de représentativité syndicale.
Nous voudrions ici préciser que, s’il est nécessaire de faire une place pour les actionnaires salariés, cela ne pourrait se faire au détriment du collège des salariés.
Nous voudrions terminer notre courte introduction en vous donnant brièvement notre position sur le rapport Barbier de la Serre et en attendant celui du Haut Conseil du secteur public.
L’approche de Monsieur Barbier de la Serre est essentiellement patrimoniale. Cette fonction a été réellement négligée depuis la création d’un secteur public conséquent. La nation a besoin de gérer son patrimoine pour son avenir. On peut ainsi concevoir que les recettes de privatisation abondent un fonds national pour les retraites, mais pas exclusivement. Les besoins à venir sont aussi importants en matière de santé par exemple.
Mais la nouvelle agence, proposée et acceptée par le Ministre de l’Economie, bouleverse profondément l’économie générale des activités de la puissance publique. Elle pourrait, à terme, vider totalement le contenu des entreprises publiques. Il est, en effet, illusoire de pouvoir penser patrimoine sans penser stratégie et politique industrielle.
Ce n’est pas d’un Etat rentier que nous voulons, mais d’un Etat moderne, dynamique et stratège. Nous sommes prêts à en assumer les changements nécessaires.
Organisme: CFDT