La préretraite coûteuse mais incontournable

Il n’en reste pas moins que les préretaites se sont développées en France beaucoup plus vite que dans les autres pays industrialisés. Pour un tiers des Français, la période des 50-60 ans est devenue celle de la fin de vie professionnelle. D’ailleurs, au-delà de 56 ans, l’ANPE renonce à obliger les demandeurs d’emploi à chercher du travail. Un cadre âgé de plus de 50 ans qui a perdu son emploi a six fois moins de chances d’obtenir un poste qu’un jeune cadre de 35 ans.

QUELLE CARRIERE POUR LES QUINQUAS?

Or, l’explication de ces départs jugés précoces ne tient pas uniquement aux conditions particulières dont bénéficient certaines activités (Armée, Mines, SNCF, enseignement primaire, etc…). Paradoxalement, alors qu’en 1993 la durée des cotisations a été portée à 40 années, les entreprises ont avancé l’âge de la fin de vie professionnelle grâce aux mesures incitatives prises par les gouvernements successifs. Ces dernières ont beau changer de sigles, elles perdurent, elles coûtent de plus en plus cher à l’Etat et à l’Unedic et s’adaptent même aux plans sociaux ou aux mesures « maison » des entreprises.

Chez Alcatel par exemple, les plus de 53 ans peuvent choisir de gagner moins pendant deux à quatre ans pour partir au terme de cette période. Fillon voudrait-il supprimer toutes ces mesures en pleine déferlante de plans sociaux? « C’est l’explosion assurée » indiquent les spécialistes (lire ci-dessous). Les pouvoirs publics ont, en effet, trouvé avec la pré-retraite un moyen coûteux de préserver la paix sociale lors des restructurations d’entreprises, privées comme publiques.

L’Etat a largement montré l’exemple: en 1985, les « métallos » de Lorraine partaient à 50 ans, à Carmaux certains mineurs ont cessé d’aller au charbon à 48 ans, à Toulouse en 2002, la SNPE propose des départs à 50 ans. Comment, dans ces conditions, refuser des dispositifs pour le privé? Pour les entreprises, la préretraite représente aussi une opportunité financière. Se séparer des salariés les plus âgés et les remplacer par de l’intérim ou des contrats à durée déterminée diminue les coûts de production.

Enfin, dans des secteurs aussi variés que les concessions automobile, le tourisme, les loisirs (20 % des clients de Disneyland-Paris sont des 55-70 ans), le pré-retraité est devenu un client indispensable.

Toujours critiquées, jamais supprimées, les préretraites ont démontré qu’elles étaient incontournables et appréciées par tout le monde. A commencer par les bénéficiaires: selon l’observatoire des retraites, 79 % sont très satisfaits. François Fillon devra mécontenter beaucoup de monde s’il veut supprimer ce nouveau paradoxe franco-français.

source : www.ladepeche.com

Auteur de l’article : comitedentreprise.com