Son objectif est unanimement salué. L’écart de rémunération entre hommes et femmes est aujourd’hui d’environ 25 %. Dans un emploi similaire, en gommant les distorsions dues à l’âge, à la formation et à l’ancienneté, un écart de 5 % à 7 % demeure. Cela malgré l’adoption de plusieurs directives et textes de loi, dont la loi Génisson de 2001 qui rendait obligatoires des négociations annuelles sur l’égalité professionnelle dans les entreprises. Mais 72 % de celles-ci ne l’ont pas appliquée (Le Monde du 25 mars).
Selon Mme Ameline, cette nouvelle loi répond à une « exigence de justice sociale, mais aussi de croissance et d’emploi » . « Les départs en retraite massifs sont en train de créer une nouvelle dynamique » , assure-t-elle.
« COUPERET DE LA LOI »
Certaines grandes entreprises l’ont déjà compris. « On voit bien arriver une tension sur le marché de l’emploi des salariés qualifiés, explique Jean-Michel Kerebel, directeur central des ressources humaines chez Renault, où un accord a été signé. Les entreprises qui réussiront sont celles qui sauront capter les talents. En favorisant l’égalité professionnelle, nous espérons attirer les jeunes femmes. »
La ministre relève que la France cumule un taux de natalité de 1,9 enfant par femme et un taux d’emploi des femmes de 80 % : « Plus les femmes travaillent, mieux elles sont au travail, plus elles ont d’enfants. »
La loi est en grande partie issue d’un accord national interprofessionnel sur la mixité et l’égalité professionnelle signé par toutes les organisations patronales et syndicales, le 1er mars 2004. « Elle entérine ce qui avait été négocié, elle ne nous gêne pas » , rappelle Martine Clément, négociatrice de cet accord pour le Medef. Selon Mme Clément, les négociations dans les entreprises sont souvent en panne « faute d’intérêt côté patronal et syndical » .
Au-delà des mesures favorables aux femmes, notamment au retour du congé de maternité, le texte prévoit qu’aucun accord sur les salaires ne pourra être conclu si une négociation sur l’égalité salariale n’est pas ouverte. « Nous respectons la liberté des partenaires sociaux, explique Françoise de Panafieu, porte-parole du groupe UMP sur le texte. Puis, s’ils ne négocient pas, il y aura le couperet de la loi. » Après un bilan, qui sera établi dans trois ans par une conférence nationale, un nouveau texte de loi pourra instaurer des sanctions financières.
Une perspective trop lointaine, selon l’opposition. « Il n’y a rien de scandaleux dans le texte, mais ses manques le sont, dit Catherine Génisson (PS, Pas-de-Calais), qui regrette l’absence d’objectifs chiffrés. La loi ne mécontente personne. C’est bien la preuve qu’elle ne changera pas d’un iota les choses dans les entreprises. » Le groupe PS a prévu de s’abstenir. Muguette Jacquaint, porte-parole du groupe communiste sur le texte, parle de « beaucoup de bruit pour le résultat qu’on peut escompter » .
Dans la majorité, plusieurs députés, dont Marie-Jo Zimmermann (UMP, Moselle), présidente de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée, et Anne-Marie Comparini (UDF, Rhône), se sont interrogés sur la nécessité de légiférer à nouveau. « Nous ne réussirons pas cette loi si celle de 2001 n’est pas appliquée. La question de l’égalité salariale ne doit pas être dissociée de l’égalité professionnelle, qui englobe la formation, l’embauche, la conjugaison de la vie professionnelle et familiale, explique Mme Zimmermann. Mais l’accentuer semblait nécessaire, et le président de la République l’a demandé ! » Jacques Chirac a fait de ce thème une priorité lors de ses derniers voeux. De son côté, Mme de Panafieu se dit favorable « à un maximum de piqûres de rappel » . « L’essentiel, c’est de sensibiliser » , résume le rapporteur du texte, Edouard Courtial (UMP, Oise).
Les députés ont profité du travail en commission des affaires sociales pour muscler le texte. M. Courtial a fait adopter un amendement qui prévoit que les entreprises devront « engager des négociations réelles et sérieuses » , et non se contenter de les ouvrir. Les députées de la majorité et de l’opposition ont fait adopter des amendements visant à augmenter la présence des femmes dans les conseils d’administration des entreprises publiques, les conseils de prud’hommes et les comités d’entreprise.
Les principales mesures
+ La conclusion d’accords collectifs sur les salaires est subordonnée à l’ouverture de négociations sur l’égalité professionnelle entre hommes et femmes. Si, dans trois ans, le résultat est insuffisant, une contribution financière assise sur les salaires sera créée par une nouvelle loi.
+ Au retour d’un congé maternité, la salariée bénéficiera de la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l’entreprise.
+ Le congé parental, d’un an renouvelable deux fois, sera fractionnable et pourra être pris jusqu’à ce que l’enfant atteigne l’âge de 16 ans, contre 3 ans aujourd’hui, selon un amendement adopté par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
+ Les congés payés annuels pourront être pris au retour d’un congé maternité, quelle que soit la période retenue dans l’entreprise pour la prise des congés, selon un amendement adopté par la commission des affaires sociales.
+ Le montant de l’allocation de formation est majoré de 10 % lorsque cette formation entraîne des frais supplémentaires de garde d’enfants.
+ Une aide forfaitaire de 400 euros est instituée pour les PME quand une femme part en congé maternité ou d’adoption, afin d’aider à faire face aux difficultés d’organisation liées à cette absence.
source : lemonde.fr