En février, la DGEFP (Direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle), puis en mars, la Dares (Direction de l’animation de la recherche des études et statistiques), organisaient chacune un séminaire sur le thème du vieillissement des salariés dans la vie professionnelle. Bernard Quintreau, membre CFDT du Conseil économique et social et co-animateur du séminaire de la DGEFP, est formel : « Nous n’aurons bientôt plus le choix. D’ici à 2010, la population des plus de 55 ans aura progressé de 40 % et les plus de 60 ans seront plus nombreux que les moins de 20 ans. Le centre de gravité de la population active va très vite se déplacer vers les 45-50 ans, c’est donc sur cette catégorie qu’il faudra s’appuyer pour maintenir la croissance. » Mais ce vivier de salariés, bientôt promus seniors actifs en réponse aux nombreux retraités dynamiques , conserve-t-il facilement la main sur l’emploi ? Non, car aujourd’hui, deux actifs sur trois sont déjà exclus du marché du travail avant d’être officiellement retraités.
Âge, compétences et carrière. Depuis vingt ans, les périodes de chômage, massif ou structurel, sont gérées sans grande originalité ni projection dans l’avenir, par un dispositif très varié de mesures d’âge . Lesquelles laissent, au passage, nombre de salariés mis en retraite anticipée dans des situations financières parfois difficiles. Mais la fin de l’écrémage par l’âge approche et, signe avant-coureur, les dispositifs légaux de cessation anticipée d’activité se tarissent progressivement. Ainsi, la nasse se resserre mais les mentalités tardent à évoluer. Le patronat veut rallonger la durée de cotisation pour financer les retraites mais use et abuse des derniers dispositifs existants de retraite anticipée. Les représentants des salariés, qui ont déjà fort à faire sur l’amélioration des conditions de travail et les restructurations, plaident toujours pour le départ des plus âgés. Les rapports d’experts sont nombreux et préconisent tous la même démarche : du salarié au territoire en passant par l’entreprise et les branches professionnelles, les solutions sont à chercher du côté de véritables politiques de gestion prévisionnelle des âges, des compétences et des carrières. Seules les très grandes entreprises commencent à prendre la mesure du problème et se penchent aujourd’hui sur les salariés qui ont dépassé la cinquantaine mais aussi la quarantaine. Des bilans à mi-carrière sont effectués individuellement avec les intéressés. Ils peuvent déboucher sur de la mobilité interne, des requalifications assorties de promotions ou encore une formation pour rebondir sur une seconde vie professionnelle.
L’accès à la formation est une autre des clés indispensables. Or, bien peu nombreux sont les quadras, moins encore les quinquas, à y accéder. La fonction publique n’échappera pas non plus au couperet du choc démographique. L’accès aux concours au-delà de 45 ans fait partie des solutions préconisées.
Une période transitoire de quatre ou cinq ans. Pour stopper l’hémorragie des plus âgés, il faut aussi et avant tout agir sur les conditions de travail. Difficile, en effet, dans la majorité des branches professionnelles, de maintenir au travail un salarié usé avant l’âge par la pénibilité ou le stress du poste occupé. Le tutorat apparaît dans les branches du secteur industriel. La CFDT va dans ce sens, à condition qu’il place le salarié dans une situation d’emploi réel et qu’il soit assorti d’une qualification et d’une rémunération à la hauteur de l’expérience transmise. Les retraites progressives doivent aussi être encouragées.
Tandis que les départs anticipés, devenus monnaie courante, sont entrés dans la culture des salariés, l’obligation d’élever le taux d’emploi au-delà de 55 ans va générer de profondes adaptations dans le travail, le recrutement et les mentalités. Pour Bernard Quintreau, il faudra gérer une période transitoire de quatre ou cinq ans. Mais dès aujourd’hui, les négociations au niveau national, des branches et des entreprises, doivent commencer.
source : CDFT