« L’hôpital connaît une situation de malaise profond », explique Jean-François Mattéi en présentant son plan Hôpital 2007 en novembre dernier. « Les médecins hospitaliers et l’ensemble des personnels soignants et non soignants sont désenchantés », poursuit le ministre de la Santé, pendant que « les gestionnaires des établissements de santé sont découragés par les lourdeurs qu’ils affrontent tous les jours ». Cependant, « l’hôpital détient en lui les ressources nécessaires à son évolution et à sa modernisation », et « le pacte de modernité » adopté par le gouvernement permettra de « redonner aux établissements hospitaliers confiance en leur avenir, fierté de leur métier au service de la santé des patients et de l’excellence de la médecine française ».
Adapter l’offre de soins aux besoins réels. Ce plan se veut en effet ambitieux. Il s’agit d’abord de « changer de logique » en passant de la régulation administrée à l’autonomie, car l’organisation actuelle, « rigide et peu autonome », décourage les volontés réformatrices. Pour les conforter, il faut instaurer des mécanismes de financement qui prennent davantage en compte l’activité médicale et le service rendu (aujourd’hui, la reconduction quasi automatique de la dotation aux établissements d’une année sur l’autre ne les incite effectivement guère à innover). C’est pourquoi le ministre « souhaite aller résolument vers la tarification à l’activité ». Des expérimentations en ce sens se dérouleront dès cette année dans une quarantaine d’établissements et des simulations seront réalisées sur tous les établissements de cinq régions. L’objectif est de généraliser ce nouveau mode de financement en 2004, car « il n’est plus temps de tergiverser mais d’agir ».
De même, il faut « assouplir la planification » pour adapter l’offre de soins aux besoins réels. Le ministre, bien que restant relativement évasif, entend faire jouer un rôle nouveau aux schémas régionaux d’organisation sanitaire, les Sros : revus tous les cinq ans, élaborés en fonction des besoins en activité de soins, par bassin de vie, ils sont promis à devenir « le dispositif central du pilotage sanitaire régional ».
L’État doit également prendre « sa part de responsabilité » pour accompagner les évolutions et la recomposition du secteur hospitalier. En France, si tout finit par des chansons, tout commence le plus souvent par des histoires de gros sous. Un plan quinquennal d’investissement sera donc engagé. Il est vrai que cela devenait urgent : soumis à des contraintes financières, les établissements ont été conduits depuis une dizaine d’années à sacrifier ce poste pour rester dans les clous de leur budget. Une enveloppe de 6 milliards d’euros est prévue sur cinq ans pour remettre en état les établissements et leur permettre d’acquérir les équipements dont ils manquent, à hauteur de 1 milliard d’euros cette année. Toutefois, il ne faut pas rêver : le gouvernement a lui aussi ses contraintes budgétaires. Il n’apportera donc en 2003 que 300 milliards d’euros frais pour « restaurer la crédibilité financière des établissements », à charge pour eux d’emprunter les autres 700 milliards d’euros ; 70 millions d’euros sont prévus pour compenser les charges financières liées à ces emprunts.
Le ministère a défini trois séries de mesures pour accompagner ce plan d’investissement. Il veut d’abord « accélérer les décisions » et, pour cela, régionaliser les enveloppes, qui seront confiées aux ARH (Agences régionales d’hospitalisation). Il souhaite également « accélérer les réalisations » en facilitant l’intervention des entreprises privées ; ce qui suppose une modification des textes afin de permettre l’implication « des personnes privées, des collectivités territoriales et des sociétés d’économie mixte dans les opérations de construction et d’aménagement ». Enfin, il a décidé la création d’une mission nationale d’appui à l’investissement , composée d’une quarantaine d’experts et chargée de « soutenir techniquement les projets » en accompagnant les ARH et les établissements.
Repenser l’organisation et la gestion des hommes. Hôpital 2007 se veut « un plan pour tous ». Il entend donc « unir les volontés d’agir de tous les acteurs » en simplifiant et unifiant les outils de coopération « à travers la notion de groupements de coopération sanitaire ». Dans ce sens, le ministère veut encourager « le partage de plateaux techniques, d’équipements ou de lits » et la mise en place de gardes communes pour garantir la permanence des soins. Parallèlement, Jean-François Mattéi souhaite « repenser l’organisation interne et la gestion des hommes » en rénovant le conseil d’administration de l’hôpital et en renforçant ses prérogatives. Il a en outre annoncé la création de deux groupes projets , l’un chargé de faire des propositions sur le statut de l’hôpital et la gestion interne, l’autre de mener une réflexion spécifique sur les CHU. Ces propositions devraient trouver un débouché législatif avant la fin 2003. Le temps de mettre en oeuvre la réforme des retraites ?
Source : CFDT