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Loi sur la sécurité intérieure : Beaucoup de répression, zéro prévention

D’une part, il crée une série de nouveaux délits (le racolage passif, le stationnement gênant de jeunes dans les halls d’immeubles, l’occupation illégale de terrains par les gens du voyage, l’outrage au drapeau ou à l’hymne national, la mendicité agressive ou le trafic de squats, etc. ). D’autre part, il punit plus sévèrement certaines infractions (exploitation et traite d’êtres humains ; crime ou délit à caractère homophobe). Enfin, il renforce les moyens donnés aux policiers pour enquêter (élargissement des possibilités de fichage par la police et la gendarmerie).

La LSI n’a pas suscité de grandes polémiques parlementaires, et pourtant elle pose un certain nombre de questions. « Certes on ne peut pas contester la légitimité de ce gouvernement à vouloir s’attaquer aux problèmes de sécurité. Et, reconnaissons-le, certaines mesures de la loi, surtout parmi celles qui sont le moins médiatisées, sont susceptibles de répondre à de vrais problèmes : les dispositions concernant le contrôle des acquisitions d’armes ou l’encadrement juridique plus strict des sociétés de sécurité privées, explique Stéphane Larignon, secrétaire confédéral en charge du dossier. Mais on constate que le volet social est totalement absent de la loi. Une politique de sécurité n’a de sens que dans le cadre d’une politique plus globale qui prend en compte la prévention. Notamment concernant les jeunes. Ce n’est pas en leur interdisant les halls d’immeubles qu’on règle un problème qui est beaucoup plus complexe. C’est aussi de leur avenir qu’il faudrait s’occuper, au lieu de les mettre à l’amende. »

De l’affichage avant tout. De nombreux professionnels et associations s’interrogent donc sur l’efficacité de mesures uniquement répressives. Quels pourront être les effets de sanctions sur les jeunes qui iennent les murs au pied des immeubles ? Auront-elles vraiment un impact sur les trafics dans les cités ? Beaucoup estiment que la loi ne s’attaque pas aux causes réelles, qu’elle ne fait que déplacer le problème. Que le gouvernement fait avant tout de l’affichage. « On risque même des effets contre-productifs. Comme pour les prostituées : en créant un délit de racolage passif, on les incite à se cacher, à exercer dans des lieux moins accessibles aux services de police et aux associations qui s’occupent d’elles. Indirectement, on les renvoie à la clandestinité. Ce qui signifie, pour elles, davantage d’insécurité, plus de vulnérabilité face aux réseaux de proxénètes », indique Stéphane Larignon. Le collectif Alerte (qui regroupe une cinquantaine d’associations) dénonce également la stigmatisation de populations parmi les plus fragiles (mendiants, prostituées, gens du voyage, jeunes), avec le risque de renforcer leur marginalisation.

Menaces sur les libertés. Autre critique que suscite cette loi : le danger qu’elle représente pour les libertés publiques, notamment par les nouvelles possibilités de perquisition données aux autorités (fouille des coffres de voiture, par exemple), le fichage élargi des citoyens et l’accès étendu à ces fichiers. La loi autorise désormais l’inscription au fichier des empreintes génétiques de tout auteur (réel ou présumé) d’infraction violente (seuls les auteurs de délits à caractère sexuel l’étaient jusqu’à présent). « Tout le problème est de savoir comment ces fichiers vont être utilisés et quels contrôles vont être mis en place pour éviter les dérives », note Stéphane Larignon. Au nom de la sécurité des citoyens, jusqu’où peut-on aller ? L’État avait déjà adopté des mesures, mais qui restaient exceptionnelles, pour faire face aux menaces terroristes. La lutte contre l’insécurité légitime-t-elle une pénalisation aussi vaste de la vie sociale ? Le débat est loin d’être clos.n

En savoir plus : Les principaux nouveaux délits

Racolage
Création d’un délit de racolage passif, passible d’une peine de « deux mois de prison au plus ». Les « personnes qui mettent des véhicules à disposition des prostitué (e)s » se verront passibles des « peines applicables en matière de prostitution hôtelière ». Un amendement prévoit de placer les prostitué(e)s dans « des centres d’hébergement de droit commun afin de faciliter leur réinsertion ».

Exploitation des êtres humains
Est créée une incrimination de « traite des êtres humains », passible de sept ans de prison et de 150 000 d’amende (dix ans et 1,5 M si la victime est mineure ou vulnérable ; de vingt ans et de 3 M si le délit est commis en bande organisée ; de la réclusion à perpétuité et de 4,5 M en cas de torture et d’actes de barbarie ). Le législateur a également prévu de punir les « marchands de sommeil », autrement dit ceux qui font du trafic de squats (un an de prison et de 15 000 d’amende).

Insultes et menaces
Le délit d’outrage au drapeau et à l’hymne national est créé. Il est passible de 6 mois de prison et de 7 500 d’amende.

Mendicité
Les mendiants qui opèrent en réunion et de manière agressive, ou sous la menace d’un animal dangereux, pourront se voir infliger jusqu’à 6 mois de prison et 3 750 d’amende.

Halls d’immeuble et terrains vagues
Gêner le passage dans les halls est passible de deux mois de prison et 3 750 d’amende et occuper illégalement des terrains non aménagés de 6 mois de prison, de 3 750 d’amende avec retrait du permis de conduire et saisie du véhicule.
source : CFDT

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