Les cyniques ne manqueront pas de souligner le bien-fondé de l’aménagement Fillon. Les 35 heures auront été appliquées dans les grandes entreprises, là où elles ont permis de remettre à plat l’organisation du travail. Après de longues négociations, les gains de productivité ainsi dégagés ont profité à la fois aux employeurs et aux employés, avec une clé de répartition enfouie au fond des comptes financiers. Il est donc hors de question de revenir aux 39 heures, même si la loi l’autorise. En revanche, la RTT ne sera de facto pas appliquée aux petites entreprises, là où elle posait des problèmes souvent ubuesques.
Mais la mesure creusera encore un peu plus le fossé qui sépare les salariés des grandes sociétés et les autres. Les uns bénéficient d’un comité d’entreprise, de plans de formation, d’une couverture retraite plus complète, de perspectives d’évolution professionnelle, de salaires plus élevés, et d’une semaine de travail désormais ramenée à 35 heures. Les autres n’ont droit à rien de tout cela et n’ont guère les moyens de s’en plaindre. Cette inégalité qui va croissant devrait pourtant alarmer tous les « partenaires sociaux » dignes de ce nom. Car elle est au coeur d’un système unanimement réprouvé dans leurs discours, à droite comme à gauche, dans les syndicats comme au patronat : celui des working poors aux Etats-Unis.
source: www.lexpansion.com